« Mon père, ce héros [dont le] sourire si doux » s’est figé à jamais
Lorsque leur arrière-petite-fille arrivait chez M. et Papa, elle se précipitait vers le fauteuil de ce dernier, ce fauteuil qui depuis son départ pour l’ehpad restait désespérément vide. Elle constatait alors dépitée : « Papi pas là… ». C’est encore plus vrai maintenant… Papi, Papa, Henri n’est plus là…
Il nous reste les souvenirs, ceux-là même qui, depuis vendredi dernier (25 février 2022), ne cessent d’affluer à notre mémoire. Mais pour en avoir fait l’expérience lors du décès de notre sœur S., il y a 2,5 ans, nous savons que l’image qui nous restera à terme de lui ne sera pas celle qui nous fendait le cœur chaque fois que nous allions le voir ces derniers mois, mais bien plutôt celle de quelqu’un qui mordait la vie à pleines dents, de quelqu’un dont le visage s’illuminait quand nous arrivions chez lui, celle d’un être chaleureux qui avait le cœur sur la main, le sens de l’humour et l’humeur taquine voire franchement grivoise.
Personnellement, je ne l’ai jamais connu autrement et je l’ai tout de même côtoyé pendant presque 58 ans… Cette personnalité joviale n’a d’ailleurs pas peu contribué à son succès professionnel. Il suffisait de voir l’accueil que lui réservaient les clients sur ses tournées pour comprendre qu’il leur apportait bien plus que de la viande… Ah, ces satanées tournées qui l’éloignaient de nous 5 à 6 jours sur 7 ! Par chance, nous avions régulièrement la possibilité de l’accompagner, chacun à notre tour, et d’entrer ainsi dans son univers. Il nous a beaucoup donné à ces occasions, le goût des bonnes choses, du travail bien fait… et cela, pour le plus grand bonheur de nos employeurs à tous. La boucherie n’était pourtant pas une vocation puisqu’il aurait souhaité devenir boulanger. Mais à cette époque-là, on ne choisissait guère. Un boucher cherchait un apprenti, on devenait boucher. Il lui a fallu patienter jusqu’à l’âge de la retraite pour mettre les mains dans la farine et faire son pain quotidien, un pain dont nos papilles se souviendront longtemps tout comme de son pâté en croûte, de son jambon sec ou de ses cornichons !
Nous lui devons une chouette enfance alors que la sienne à lui, l’enfant de la guerre, n’avait sans doute pas été un long fleuve tranquille. Nous n’en savons en fait pas grand-chose. C’était en effet un grand pudique, pas du tout expansif dès qu’il s’agissait de parler de lui. Ainsi n’avons-nous appris que récemment que le plus grand plaisir qu’il pouvait offrir à son propre père, qui n’était pas resté assez longtemps sur les bancs de l’école pour maîtriser vraiment la lecture, était de lui lire le journal à voix haute. La lecture, Papa l’a toujours adorée mais a dû attendre d’être à la retraite, là encore, pour s’y adonner, avec ce goût marqué pour les romans policiers qu’il a transmis à la plupart d’entre nous. C’était tout sauf un père sévère. Quand il essayait de faire preuve d’autorité, il n’était tout simplement pas crédible. Il préférait de beaucoup nous initier au 4.21, aux dames ou à la pétanque ou encore nous emmener faire un tour en forêt à la recherche de muguet quand revenait le joli mois de mai. Il avait un sens aigu de la famille qui nous a valu d’innombrables dimanches après-midi à Plaines-Saint-Lange, après-midi qui se terminaient souvent en grande tablée autour d’un pot-au-feu ou d’une omelette aux pommes de terre, le plat préféré de notre grand-mère paternelle.
Nos rapports ont forcément évolué par la suite, au fur et à mesure que nous avons grandi et pris notre envol vers d’autres horizons. Il y eut des périodes plus difficiles que d’autres, lors de notre adolescence par exemple. Je me souviens d’avoir essayé d’en apprendre davantage sur la guerre d’Algérie, cette « aventure [dont sa génération] ne voulait pas ». Je parlais de droit des peuples à disposer d’eux-mêmes quand lui revivait les soirs passés à «[griller] des cigarettes afin d’avoir moins peur ». Il s’était mis dans une colère noire cette fois-là, colère que je n’ai pas comprise. Nous n’en avons jamais reparlé… Nous avons également dû nous rendre à l’évidence qu’il n’était pas seulement notre père, mais un homme dont les choix nous ont parfois blessés. Mais il faut toujours laisser le temps au temps. Ainsi avons-nous appris à connaître, apprécier et enfin aimer la seconde femme de sa vie, M. La vie leur a accordé de belles années passées entre autres à visiter la France en camping-car avec leurs compagnons à quatre pattes. Ils en auraient mérité davantage encore, mais le sort en a décidé autrement. Les dernières années de papa ont été une lente descente aux enfers qui nous a tous profondément révoltés et bouleversés. Te savoir à ses côtés, M., nous a rassurés, nous ne sommes pas près d’oublier le dévouement dont tu as fait preuve jusqu’au bout. Et c’est en ta présence qu’il a choisi de refermer définitivement le livre d’une vie dont il ne voulait plus.
Merci aussi à S. notre belle-sœur, d’avoir toujours été là, elle qui, employée à l’ehpad, entrait dans sa chambre comme « un rayon qu’on espère » et le gratifiait d’un « Salut, beau gosse ! » qui le ravissait.
Merci à toi aussi petit frère qui, tout au long de cette descente aux enfers dont je parlais plus haut, a tissé un lien de plus en plus étroit avec Papa. Te voir t’occuper de lui, prévenir ses moindres désirs, prononcer les mots qu’il ne pouvait plus dire nous émouvait aux larmes, MH. et moi, nous qui nous sentions coupables de ne pouvoir être aussi présentes qu’il aurait fallu l’être…
Je terminerai par les lignes particulièrement touchantes que sa troisième petite-fille m’a envoyées à 1H38 ce matin – dans la famille "bâtons de chaise", je demande la petite-fille !
« Hier soir, c’est une table remplie d’une famille unie, soudée dans l’adversité avec de la joie de vivre. Je sais que tu aurais adoré nous voir tous ensemble, à se chamailler, s’embêter, rire mais surtout s’aimer ! Papy, c’est toi qui nous as appris à être heureux malgré la peine, à être unis malgré la distance, à s’aimer quoi qu’il arrive ! En te disant au revoir, j’ai vu un homme serein, apaisé et je le suis à mon tour. Je suis prête à te dire au revoir, oui seulement au revoir car tu resteras à jamais dans mon cœur. Tu m’accompagneras dans chacune de mes étapes de vie telles que mon mariage, la naissance de mes enfants à qui je conterai nos histoires. Je t’aime, Papy ! »
Texte lu lors de la cérémonie d’adieu à Papa, le 2 mars 2022 à Semur en Auxois
Héritée de Babylone1, reprise par les Romains2, la tradition des bonnes résolutions n’est devenue celle que nous connaissons aujourd’hui qu’une fois revisitée par le christianisme. Depuis, nous pre–nons rituellement en début d’année – ne serait-ce qu’in petto – l’engagement solennel d’arrêter de fumer, de boire, de manger n’importe quoi à n’im–porte quelle heure, de ne vivre que pour notre travail ou encore de ne plus considérer que le sport, c’est pour les autres. Or, comme chacun sait, la principale caractéristique dudit engage–ment est de porter en germe son propre échec ou pour citer Oscar Wilde, « les bonnes résolutions sont des chèques tirés sur une banque où on n’a pas de compte courant ».
Die Region Beaujolais erstreckt sich zwischen den Flüssen Loire und Saône sowie der südlichsten Stadt Burgunds Mâcon im Norden und Villefranche sur Saône im Süden. Schon im 19. Jahrhundert hatten sich die Winzer und Weinhändler des Beaujolais angewöhnt, ihren Wein früh zu verkaufen. Zu dieser Zeit war der Beaujolais nämlich bereits berühmt und galt im Volksmund sogar als »dritter Fluss der Stadt Lyon«, da die Weine damals auf dem Wasserweg in die französische Hauptstadt gelangten.
Il est des commémorations dont on se passerait bien, au sens où l’humanité, elle, se serait bien passée des chapitres écrits en lettres de sang dans le livre de la grande Histoire auxquels elles renvoient.
Jamais je n’aurais pensé devoir prendre un jour le panneau de signalisation ci-contre au sens propre. Depuis le 16 octobre 2020, j’ai beau examiner et examiner encore mes souvenirs, nulle part je ne trouve trace d’un quelconque danger lié à la fréquentation de l’école. Qu’avions-nous à redouter en effet ? Des mauvaises notes, des punitions pour ne pas avoir fait nos devoirs ou les avoir bâclés, pour avoir bavardé avec notre voisin ou copié sur lui, pour avoir mangé du chewing-gum en classe… Bah, on passait un quart d’heure au coin, on faisait x fois le tour de la cour, on était de corvée de nettoyage du tableau (noir) pendant quelques jours, privé de récréation ou copiait 100 fois « Je ne mangerai plus jamais de chewing-gum en classe. »… et on n’en parlait plus.
Samuel Paty « était un professeur, un simple professeur qui croyait que savoir était un grand trésor »2 et qui l’a payé de sa vie. Vendredi dernier, ses collègues et leurs élèves, ses supérieurs, ses compatriotes et tous ceux pour qui la liberté d’expression n’est pas qu’une formule lui ont rendu hommage. J’ai pensé à l’une de mes sœurs, professeur des écoles, et à ce titre chargée de transmettre à ses élèves de CP/CE1 un message dont nombre d’adultes ne mesurent pas, ne veulent pas mesurer la portée. J’ai pensé aussi à sa fille, Clara (7 ans), qui, avant même d’en maîtriser la graphie, a déjà compris le pouvoir d’exutoire des mots et pour qui l’école est aussi désormais ce lieu d’où maman risque un jour de ne pas rentrer.