Alors, il existe ou pas, ce père Noël ?

Je ne sais si la vérité, qui n’est pas toujours bonne à dire, sort vraiment de la bouche des enfants, mais s’entretenir avec eux est de fait fort instructif. L’une de mes dernières conversations avec ma nièce Clara (6 ans), alors qu’elle était en train de rédiger "ses" lettres "aux" Pères Noël – pluriel de rigueur puisque chaque membre de la famille lui offrant un cadeau dispose (évidemment !) de son propre Père Noël –, en est la meilleure illustration.

Extrait :

« Tu sais, Tata, eh ben, y en a à l’école qui disent que le Père Noël en vrai, c’est les parents. », lance-t-elle.

Complètement absorbée par la tâche consistant à découper dans un catalogue de jouets tous les articles qu’elle va commander au Père Noël de papa et maman, au Père Noël de mamy Odile, au Père Noël de papy Henri, au Père Noël de mémé et pépé, etc., elle ne me regarde pas. Vous aurez d’ailleurs vous aussi remarqué que, lorsqu’ils s’apprêtent à aborder un sujet délicat (pour eux ou pour leurs parents), les enfants ne le font généralement pas entre quat’z’yeux. 

Estimant que ce n’est pas à moi de lui révéler ce qu’il en est, je botte en touche :

« Et toi, qu’est-ce que tu en penses ?

– Ben, je sais pas, moi… », rétorque-t-elle, toujours sans me regarder, de ce ton faussement innocent qu’elle manie avec maestria et qui dément totalement ce qu’elle vient de dire.

J’échange avec mon beau-frère, qui assiste à la scène, un regard mi-amusé, mi-conscient que Clara s’apprête à franchir l’une des nombreuses étappes qui la mèneront plus ou moins lentement mais sûrement vers la fin de l’enfance.

La fine mouche a bien sûr levé les yeux à ce moment-là… et se décide cette fois à appeler un chat un chat :

« Alors, il existe ou pas, ce Père Noël ?! »

N’ayant pas envie de mentir et continuant d’estimer que ce n’est pas à moi de répondre, je garde le silence. Mon beau-frère ne sachant visiblement pas comment se tirer de ce mauvais pas, brille lui aussi par son absence de réponse.

Clara, qui en a interrompu ses découpages, se délecte ostensiblement de l’incertitude dans laquelle nous nous débattons et affiche une mine triomphante, ravie de nous avoir damé le pion. Quant à sa croyance au Père Noël, elle vit à n’en pas douter ses derniers jours !