« Rendre la femme africaine visible »

Daughters of LifeCréé en 1862, le Museum Fünf Kontinente, qui s’appelait alors Königlich Etnographische Sammlung, fut le tout premier musée ethnologique d’Allemagne. Vivant à Munich depuis presque trente ans, j’y suis allée dernièrement pour la toute première fois, l’affiche de l’exposition Daughters of Life (cf. ci-contre) ayant littéralement aimanté mon regard. La découverte des photographies d’Angèle Etoundi Essamba fut un de ces moments privilégiés que l’on ne saurait garder pour soi1.


Née à Douala au Cameroun en 1962, Angèle Etoundi Essamba a quitté son pays pour la France à l’âge de dix ans. C’est à Amsterdam, où elle a fait ses études à la Foto Academie puis exposé pour la toute première fois en 1985, qu’elle vit aujourd’hui… quand elle ne parcourt pas le monde. Considérée en effet comme l’une des artistes africaines les plus douées de sa génération, elle est aussi l’une des plus connues et enchaîne les expositions. Depuis le 23 mars dernier et jusqu’au 1er juillet, les Munichois peuvent découvrir l’œuvre de cette citoyenne du monde au Museum Fünf Kontinente à travers l’exposition Daughters of Life. Le rôle et la place de la femme dans les sociétés africaines sont au cœur des préoccupations de l’artiste engagée dont les photographies sont sans aucun doute susceptibles de venir à bout de bien des clichés et cela, peut-être plus efficacement que de longs discours.

 

IMG 1504Ainsi qu’elle l’a indiqué lors de la visite guidée organisée en sa présence le 13 mai dernier (journée internationale des musées), Angèle Etoundi Essamba n’aurait pas choisi pour l’affiche de Daughters of Life la photo qui a attiré mon attention mais La sablière 4 (1996) qui fait partie de la série en noir et blanc qu’elle a consacrée au thème de la calebasse et qui orne du reste la couverture du catalogue de l’exposition.


La calebasse, fruit du calebassier (famille des cucurbitacées), est considérée dans de nombreuses cultures africaines comme le cadeau le plus précieux que le Créateur ait fait à l’humanité d’où la charge symbolique (abondance, fécondité, maternité, féminité) qui lui est associée. Comme elle est en outre multi-usages (alimentation, hygiène, musique) et à ce titre omniprésente dans la vie quotidienne, c’est le cadeau de mariage par excellence. Et la jeune mariée, qui se la voit offrir, en prend d’autant mieux soin que la calebasse est extrêmement fragile. Lorsqu’il arrive qu’elle se brise, elle n’est en aucun cas jetée mais réparée, les sutures qu’elle arbore ensuite faisant irrésistiblement penser aux cicatrices que la vie grave dans la chair de chacun d’entre nous.


Je reste néanmoins persuadée que l’affiche telle qu’elle est remplit non seulement parfaitement son office, mais permet en outre à la photographe d’atteindre son objectif de « rendre la femme africaine visible ». Cela peut tout d’abord paraître paradoxal voire susciter l’incompréhension tellement les tenues chamarrées et chatoyantes des femmes africaines attirent l’œil. Mais la visibilité dont il est ici question n’est pas celle-là : ses photographies sont pour l’artiste le moyen de faire prendre conscience à qui les contemple du rôle essentiel de toutes ces Women in Action, pour reprendre le titre de la série qu’elle leur a dédiée, dans le développement économique du continent africain et la préservation des écosystèmes locaux, qu’il s’agisse des femmes qui contribuent à faire du Cameroun le troisième pays producteur d’huile de palme d’Afrique, du Sénégal le premier producteur de sel d’Afrique de l’Ouest ou de celles à qui la République démocratique du Congo doit de produire 60 % du cobalt mondial, de celles qui récoltent les huîtres au Bénin, etc. Il s’est instauré entre Angèle Etoundi Essamba et les femmes qu’elle a photographiées une telle relation de confiance que celles-ci ne lui ont pas simplement donné leur image mais leur vérité, leur être. D’où cette impression de ne pas voir une galerie de portraits mais de faire une succession de rencontres. En résumé, une exposition à voir !

Töchter des Lebens/Daughters of Life du 23 mars au 1er juillet 2018, Museum Fünf Kontinente de Munich

 

1 cf. également le compte-rendu que ma consœur Agnès Tondre a fait de sa visite de l’exposition sur son propre blog.

 

 

Marie-Odile Buchschmid
Birkenweg 14
82291 Mammendorf

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