Comme une bête

Joy Sorman, Gallimard, 2012

“Comme une bête“ est l'histoire d'un jeune homme qui aime les vaches au point de devenir boucher, nous annonce l'éditeur. Une phrase qui m'a suffi pour cliquer et acheter ce livre. Un comportement qui s'explique par mon enfance : mon père a exercé le métier de boucher pendant 40 ans et jamais je n'avais eu l'occasion jusque ici de voir sa profession mise en lumière. C'est peu de dire que je me suis jetée sur l'ouvrage et l'ai dévoré avec gourmandise, chaque page me faisant l'effet d'une madeleine de Proust. Cette frénésie ne s'explique pas uniquement cette fois par la dépendance pathologique que j'ai à la lecture. J'ai passé ma petite enfance dans le laboratoire de la boucherie où mon père travaillait. Curieux univers pour une gamine haute comme trois pommes et pourtant, je m'y sentais comme un poisson dans l'eau entre les carcasses, les couteaux et les hommes aux tabliers maculés de sang. J'aurais pu contempler mon père des heures durant quand il était en train de jouer du couteau pour désosser un morceau de viande sans trop de pertes. Je trouvais ça beau. J'ai encore l'odeur de la viande dans le nez, le bruit des couteaux qui crissent sur l'os ou que l'on aiguise dans l'oreille. Et j'ai retrouvé tout cela dans “Comme une bête“ de Joy Sorman, dont je tiens à saluer la performance. Tout y est ! Mais ça, Les Inrocks l'ont mieux exprimé que je ne saurais le faire : http://www.lesinrocks.com/2012/09/02/livres/comme-une-bete-joy-sorman-11288696/.

Les morts ont la parole

Lame de fond, Linda Lê, éditions Christian Bourgeois, 2012

Les deux premières phrases de la quatrième de couverture, qui en sont également l'incipit, m'ont immédiatement donné envie de lire ce livre. Allez, je ne vous fais pas languir, les voici : “Je n'ai jamais été bavard de mon vivant. Maintenant que je suis dans mon cercueil, j'ai toute latitude de soliloquer.“ Mon petit côté morbide sans doute. Il faut dire que quand on passe sa vie à la lire au lieu de la vivre, on s'imagine assez bien vivre sa mort en causant ! Le mort de ce livre, Van, cause donc, et il cause beaucoup, et il cause bien. Son registre de langue est un vrai régal ! Rien d'étonnant à cela, il était rédacteur (free-lance). Toute similitude entre le héros de Linda Lê et l'auteure de cette chronique, qui se trouve exercer la même profession, n'est vraisemblablement pas fortuite… Van donc, dont le prénom dénote une origine asiatique qui sera bientôt confirmée, a été renversé et tué sur le coup par une voiture conduite par… sa femme Lou. L'a-t-elle fait intentionnellement ou s'agit-il d'un accident particulièrement malencontreux ? Lou est la première à se torturer l'esprit à ce sujet. Elle aurait eu un motif de s'en prendre à Van. Celui–ci entretenait en effet une relation très particulière avec une certaine Ulma. La véritable victime dans cette histoire, c'est en définitive Laure, la fille de Van et de Lou.

Van, Lou, Ulma et Laure prennent tour à tour la parole, le style s'adaptant à la personnalité de chacun en contribuant par ailleurs à la façonner. Le lecteur apprend à les connaître avec leurs fêlures et découvre tout ce qui a précédé l'accident. Linda Lê entretient un habile suspense jusqu'à la révélation finale, qui vient titiller la bien-pensance qui sommeille plus ou moins profondément en chacun d'entre nous. Mais ça, ce n'est plus l'affaire de l'auteure !

Le dernier Marc Lévy

Un sentiment plus fort que la peur, éditions Robert Laffont – Versilio

Je confesse volontiers que je ne suis pas fan de Marc Lévy. Si l'on en croit une interview du magazine Elle qui remonte déjà à un certain temps, ce dernier ne se prend pas pour un écrivain. Dans cette même interview, il déclare : “Moi, j’ai juste envie de raconter des histoires – en essayant de respecter la langue française – et de permettre aux gens de s’évader de leur réalité.“ Toute critique lui reprochant de ne pas être ce qu'il n'a pas l'ambition d'être se trouve par avance désamorcée !

Ne pouvant pour des raisons professionnelles ignorer totalement ce qui se passe sur le marché du livre français, j'ai donc il y a quelques jours entamé la lecture du dernier opus signé Lévy. Résultat, je l'ai dévoré. C'est un polar bien ficelé qui tient en haleine de la première à la dernière page. L'histoire ? Susie Baker veut à tout prix innocenter sa grand-mère accusée dans les années 60 de haute trahison. Sa quête de la vérité la conduira à en compagnie du journaliste Andrew Stilman à prendre les risques les plus inconsidérés. Les services secrets américains s'en mêlent… Mais à la fin, tout est bien qui finit bien. Les événements qui servent de trame au récit ne sont pas totalement inventés, ce qui lui confère sa cohésion. C'est aussi captivant que du Dan Brown – comparaison d'autant moins saugrenue que l'action se déroule aux Etats-Unis – mais en nettement moins sanguinaire. Un bon bouquin pour frissonner tout en se relaxant les méninges !

Secret de famille et embruns

Adèle et moi, Julie Wolkenstein, éditions POL, 2013

Vous aimez les sagas familiales sur fond d'histoire contemporaine, préférez la Normandie à la Côte d'Azur ? Alors, vous avez des chances plus que raisonnables d'aimer Adèle et moi. En mettant de l'ordre dans les affaires de son père, qui vient de mourir, la narratrice découvre un pan de l'histoire familiale qu'elle ignorait totalement. Elle veut en savoir plus et en aura pour l'argent dont la fameuse Adèle du titre, son aïeule, n'a jamais manqué. L'alternance entre aujourd'hui et hier, que dis-je avant-avant-hier, maintient le rythme de ce livre aux allures de roman policier. Quelques escapades du côté de la psychanalyse et autre psychogénéalogie pour relever le tout. 600 pages pour s'en délecter !

Pas convaincu(e) ? Allez voir du côté de Télérama et du Monde.

Histoire au menu

Les Petits Plats de l'histoire, Jean Vitaux, éditions puf, 2012

Pour indiquer que l’histoire ne se répète pas, on dit volontiers qu’elle « ne repasse pas les plats ». Cette expression se justifie d’autant plus que gastronomie et histoire ont toujours entretenu des liens étroits. Ces derniers ont inspiré Jean Vitaux, dont le livre rafraîchit et complète nos souvenirs de cours d’histoire de manière particulièrement plaisante. On apprend par exemple que si les légionnaires romains tendent à Jésus mourant une éponge d’eau vinaigrée, ce n’est pas par désir de le torturer davantage, mais parce qu’eux-mêmes, pour éviter les épidémies, ne boivent pas autre chose. On découvre en outre que les problèmes de ravitaillement des armées sous la Révolution et le Premier Empire sont à l’origine de l’invention des conserves ou que la Première Guerre mondiale a joué un rôle essentiel dans la diffusion du camembert…

Cet ouvrage ne se dévore pas. On en dégustera au gré de ses appétits les anecdotes, toutes ces petites histoires sans lesquelles l’Histoire n’aurait pas la même saveur !

Jean Vitaux n’est pas seulement médecin gastro-entérologue. C’est aussi un fin gourmet qui se passionne pour l’histoire de la gastronomie. Il lui a d’ailleurs consacré plusieurs ouvrages, dont un Dictionnaire du gastronome (2008) remarqué.

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Marie-Odile Buchschmid
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